Go Funk Yourself #2

Non, le Funky Ronin n'est pas mort ! Il revient avec ce second épisode de Go Funk Yourself qui est consacré à un seul film mais non des moindres : The Last Dragon de Michael Schultz.

Am I the baddest mofo, low-down, around this town ?


A New-York, un jeune et candide black adepte des arts martiaux (à un point tel qu'il se balade dans Harlem en costume chinois et mange ses pop-corn avec des baguettes), Leroy Green (joué par le détenteur d'une ceinture noire Taimak) rêve de devenir l'égal de son idôle : Bruce Lee (ce qui lui vaudra le surnom de Bruce Leroy).
En lui remettant un médaillon, son maître lui annonce qu'il n'a plus rien à lui apprendre et qu'il doit atteindre le dernier niveau de son apprentissage seul. Ceux qui atteignent ce dernier niveau acquièrent "The Glow", une aura pouvant émaner de tout le corps si l'on devient ze best of ze best. Dans sa quête, Leroy affrontera le méchant producteur blanc Eddie Arkadian (Christopher Murney, sosie de George Costanza) et son homme de main crétinoïde (l'excellent Mike Starr) ainsi que, last but not least : Sho'nuff, le Shogun de Harlem (Julius Carry) pour les doux yeux de la belle Laura Charles (Vanity).


The Last Dragon est donc réalisé par Michael Schulz mais comme l'annoncent l'affiche et le générique c'est avant tout Berry Gordy's The Last Dragon.
Oui, LE Berry Gordy, fondateur du mythique label de Detroit : la Motown. Il avait déjà mis le nez avec succès dans la blaxploit' dans les 70s en produisant Lady Sings the Blues en 1972 et Mahogany (qu'il réalise) en 1975, deux films mettant en scène sa star du moment : Diana Ross.
Même topo donc en 1985, cette fois-ci pour appuyer le lancement de la fraichement signée dans les rangs de la Motown : Denise "Vanity" Mitchell, ancienne petite amie de Prince et ancienne chanteuse du girls band du Love Symbol : Vanity 6. Elle jouera ici la jeune et jolie présentatrice télé déniaiseuse d'apprenti petit dragon.
Bien que le film date de 1985, soit environ une dizaine d'années après l'apogée du genre, The Last Dragon est véritablement un film de blaxploitation, surfant sur le succès du premier Karate Kid.



Le film est tellement ancré dans les années 80 de par la bande originale, les vêtements (dont un savoureux caméo de William H Macy en veste de survêt' fluo), l'ambiance vidéoclip, les coupes de cheveux (celle de la protégée du producteur vaut son pesant de cacahuètes), des ghettos blaster à tous les coins de rue (Leroy rencontre trois chinois adèptes de Genesis et jivant comme les derniers des pimps) qu'il donne l'impression d'être devant un film de science-fiction, une capsule spatio-temporelle, un conte de fées qui pique les yeux.
Le métrage est aussi jonché de références à la filmo du Petit Dragon : la première confrontation Leroy / Sho'Nuff se déroule dans un cinéma projetant Opération Dragon (projection s'arrêtant pour l'entrée du Shogun de Harlem) dans ce qui ne peut être qu'un ciné de la 42nd avec son public hétéroclite (allant du rasta fumant un gros spliff au biker cloutée en passant par des b-boys dansant dans les allées de la salle) vivant ce qui se passe à l'écran ; Leroy revêtant l'habit jaune à bande noire lorsqu'il donne des cours kung fu aux gamins du quartier ; la carrure filiforme de Julius Carry le fait passer pour un Kareem Abdul Jabbar sous coco lors du combat final...
Le Glow de Sho'nuff n'est pas non plus sans rappeler Lo Lieh dans La Main de Fer et on a le droit a une apparition de Ernie Reyes Jr lors du combat de Leroy contre les mercenaires engagés par le producteur (mais si, vous savez, le gamin de la série Le Chevalier Lumière).


Il y a comme un petit quelque chose, non ?

La véritable attraction de l'entreprise est bien évidemment le personnage campé par le regretté Julius Carry (Lord Bowler dans l'excellente série Les Aventures de Brisco County Jr), Sho'Nuff le Shogun de Harlem, tout simplement jubilatoire en mégalomane à la tête d'une bande toute entière acquise à sa cause.

Sho’Nuff: Am I the meanest?
Gang: Sho’Nuff!
Sho’Nuff: Am I the prettiest?
Gang: Sho’Nuff!
Sho’Nuff: Am I the baddest mo-fo, low-down, around this town?
Gang: Sho’Nuff!
Sho’Nuff: Well, who am I?
Gang: Sho’Nuff!
Sho’Nuff: Who am I?
Gang: Sho’Nuff!
Sho’Nuff: I can’t hear you!
Gang: Sho’Nuff!
Sho’Nuff: The Shogun of Harlem!

A l'instar du personnage de Dolemite, Sho'nuff a eu un énorme impact sur la culture populaire et bien entendu sur le hip-hop (les lunettes de Kanye West, Busta Rhymes en Shogun de Harlem dans son clip Dangerous reprenant le fameux speech...) et pour cause. Un des meilleurs méchants de tous les temps, (Sho')nuff said.
Un remake est apparemment prévu (RZA en est un des producteurs) avec Samuel L Jackson pour reprendre le rôle de Julius Carry.
Worst. Idea. Ever.